Contestation politique & Violation des libertés publiques : Le cas du MRC

MRCUn sympathisant de Maurice Kamto, leader du parti d’opposition camerounais Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) brandit une banderole à Yaoundé, le 30 septembre 2018, lors d’un rassemblement électoral pour l’élection présidentielle. (Photo: MARCO LONGARI / AFP) (Crédit photo: MARCO LONGARI/AFP via Getty Images)

Dans l’histoire contemporaine du Cameroun, l’élection présidentielle de 2018 marque le retour explicite de l’ensauvagement des libertés publiques après l’expérience de 2008.

La proclamation de la victoire du président Paul Biya a en effet entrainé l’articulation d’un vaste mouvement de contestation politique par le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun.

Sorti officiellement deuxième à l’issue de cette élection, le MRC mis en cause la légalité de l’annonce de ces résultats et par ricochet la légalité de la présence de Paul Biya à l’institution présidentielle.

Le parti dirigé par le juriste Maurice Kamto, décida alors de descendre dans la rue pour exprimer ce point de vue en opposition fondamentale à la décision du Conseil Constitutionnel.

Et comme à l’accoutumé, la puissance publique fut à chaque fois mobilisée par le régime pour « écraser » les manifestants ainsi que plusieurs cadres du MRC.

Faits marquants

  • De toutes les élections présidentielles organisées au Cameroun, celle de 2018 a été la plus contestée dans la rue.
  • En dépit des raisons objectives soulevées et du fait que la posture contestataire du MRC s’intègre dans le champ de la liberté d’opinion, les libertés d’expression et de manifestation, le régime camerounais a eu une approche particulièrement agressive et violente à son égard, violant les libertés politiques des manifestants.
  • Toutes les manifestations du MRC après cette élection ont été réprimées par le régime du renouveau  sous prétexte de trouble à l’ordre public.
  •  Aujourd’hui encore, de nombreux militants, sympathisants du MRC se trouvent toujours dans les différentes prisons du pays.
  • La répression demeure la réponse du régime face aux contestations des partis politiques et autres associations critiques vis-à-vis du pouvoir.  

Le point de départ

L’histoire politique du Cameroun est traversée par des mobilisations contestataires. Cela s’est encore vérifié au lendemain de l’élection présidentielle de 2018. La proclamation de la victoire de Paul Biya avait poussé le MRC à organiser des marches de contestation de la légitimité de ce dernier.

Des raisons sécuritaires, politico-électorales et de gouvernance furent avancées comme les motifs de ces marches dont les plus significatives sont celles du 26 janvier 2019, du 1er juin 2019 et du 22 septembre 2020.

En dehors des manifestants, les principales figures du parti furent toutes arrêtées successivement lors de ces trois marches contestataires. Maurice Kamto, président national du MRC et d’autres compagnons furent arrêtés à l’issue de la marche de janvier 2019.

Son premier vice-président Mamadou Mota, Paul Marie Biloa Effa, le conseiller spécial du président national, et autres furent arrêtés à l’issue de la marche du 1er juin 2019. Le trésorier national du MRC, Alain Fogué, Olivier Bibou Nissack, le porte-parole de M. Kamto et bien d’autres furent arrêtés à l’issue de la marche de septembre 2020.

A chaque marche du MRC, au moins deux cadres sont mis aux arrêts qu’ils aient participées ou non à la marche proprement dite. C’est le cas, par exemple, des deux dernières figures citées.

Ainsi, leaders, militants, sympathisants, manifestants et même simples passants tombent entre les mains des structures sécuritaires du président camerounais à chaque occasion qu’une marche de contestation de son pouvoir est organisée.     

Les outils de la violation des libertés publiques et les modes opératoires

Une bactérie d’outils est généralement mobilisée pour anéantir le mouvement de contestation. Dès l’annonce de l’organisation d’une marche, la réaction du régime ne se fait pas attendre.

Lorsqu’un dossier de déclaration à une manifestation est déposé dans une administration préfectorale, le préfet évoque l’argument de risque de trouble à l’ordre à public.

De son côté, le gouvernement saisit les chaines d’information publique pour disqualifier les raisons évoquées relativement à l’appel à manifestation.

A la radio, à la télévision, dans la presse gouvernementale, les premières intimidations contenues dans des communiqués du gouvernement sont alors formulées.

Ces communiqués, formulés dans un ton guerrier, sont faits dans le dessein d’installer la peur dans les esprits des manifestants potentiels.

Cette peur est renforcée par les blindés militaires et autres engins de la gendarmerie ou la police qui sont déployés dans les rues des grandes villes comme Douala et Yaoundé bien avant le jour dit de la manifestation.

Le jour de la manifestation arrivé, l’on peut voir, dès les premières heures de la matinée, des pick-up de la police, des camions à lance eau de la gendarmerie stationnés dans les coins névralgiques de la ville comme la poste centrale, le marché Mokolo, le carrefour Melen, le boulevard du 20 mai pour ce qui est par exemple de la ville de Yaoundé.

Et lorsque les manifestants font le choix de braver ces obstacles, ils reçoivent des gaz lacrymogènes, sont arrosés d’eaux. Il en suit des arrestations musclées.

Arrêtés, ces manifestants sont entassés dans des camions et pick-up en direction des structures policières et judiciaires comme lors des arrestations du 22 septembre 2020 où environ 600 manifestants furent conduits au Secrétariat d’Etat à la Défense (SED), à la Police Judiciaire (PJ), au Commissariat n° 1 de la ville de Yaoundé et plus tard dans les prisons principales et centrales. MN

  • Abonnez-vous à notre Newsletter et recevez régulièrement l’essentiel de l’actualité camerounaise dans votre boîte mail. S’abonner ici

Soyez le premier à laisser un commentaire on "Contestation politique & Violation des libertés publiques : Le cas du MRC"

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.


*