Paul Biya : Le dernier des grands tyrans de la postcolonie

Paul Biya - Président du CamerounS.E.M. Paul Biya - Président de la République du Cameroun

Paul Biya est né le 13 février 1933 à Mvomeka’a, subdivision de Meyomessala, département du Dja-et-Lobo, Région du Sud. Il est le deuxième président de la République du Cameroun.

Il a pris ses fonctions le 6 novembre 1982 à la suite de la démission du président Ahmadou Ahidjo. Paul Biya a épousé Mme Chantal Biya le 23 avril 1994. Il est père de trois enfants : Frank Biya, Paul Biya Junior et Anastasia Brenda Biya Eyenga.

Son maintien au pouvoir

  • « Les 20 pires dictateurs » : Biya s’est maintenu au pouvoir par des moyens autoritaires classiques. «Les tyrans, les 20 pires dictateurs vivants du monde», de David Wallechinsky, a classé Paul Biya parmi deux autres « tyrans » d’Afrique subsaharienne : Teodoro Obiang Nguema Mbasogo de Guinée équatoriale et le roi Mswati du Swaziland.
  • Le processus électoral : David Wallechinsky décrit le processus électoral au Cameroun en ces termes : «Tous les cinq ou sept ans, Biya organise des élections afin justifier la poursuite de son règne, mais ces élections n’ont aucune crédibilité.
  • « Des élections bidons » : « En fait, Biya est crédité d’une innovation créative dans le monde des élections bidons. En 2004 , dérangé par les critiques des groupes internationaux de contrôle des votes, il a payé son propre « groupe d’observateurs internationaux », six anciens membres du Congrès américain, qui ont certifié son élection comme étant libre et juste. »
S.E. M. Paul Biya - 11 mars 1992 - Élection présidentielle
S.E. M. Paul Biya – 01 mars 1992 – Élection présidentielle
  • L’usage de la force : le camerounais Biya a compensé toutes les ouvertures politiques, qui lui ont été imposées (comme dans les années 1990), par l’usage stratégique de la force (1992, 2008).
  • La corruption : Il a toléré (mais désapprouvait en apparence) un niveau élevé de corruption, qui favorisait ses alliés et soutenait les activités du parti au pouvoir, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). L’opposition a été largement cooptée, soit avec des postes ministériels, des faveurs ou de l’argent.
  • Un système politique centralisé : Biya a également maintenu un système politique hautement centralisé et hiérarchisé, avec un groupe d’hommes de confiance travaillant pour les uns dans l’administration, pour les autres dans le privé.
  • Les jeux d’énigmes : Biya est également connu pour ses jeux d’énigmes, qu’il utilise à bon escient pour tenir son gouvernement et ses détracteurs potentiels à loin de lui. Cela a donné naissance à un régime conservateur et préservationniste. La prise de décision est lente et très centralisée, la bureaucratie est très dysfonctionnelle.

Ses études

  • Ses origines : Paul Barthélemy Biya’a Bi Mvondo est né le 13 février 1933 à Mvomeka’a (Meyomessala) de feu Etienne Mvondo Assam et de Mme Mvondo (née Anastasie Eyenga Elle).
Paul Biya – 1957
  • Études primaires et secondaires : En 1948, Biya a obtenu le certificat de fin d’études (CEPE); il a étudié en 1948/1950 au petit-séminaire St. Tharcissius, Edéa; 1950/1954 au petit séminaire d’Akono; 1954/1956 au lycée général Leclerc. En juin 1955, il obtient le baccalauréat 1ère partie, et en juin 1956: le baccalauréat 2ème partie au lycée Louis le Grand (Paris).
  • Études supérieures : Il est titulaire d’un diplôme en droit public, d’un diplôme de l’Institut d’études politiques, d’un diplôme de l’Institut des Hautes Études d’Outre-Mer et d’un Diplôme d’études supérieures en droit public.

Son parcours au sein de l’administration camerounaise

  • Assistant : Paul Biya a été chargé de mission (assistant) à la présidence de la République : octobre 1962; Directeur de cabinet au ministère de l’éducation nationale : janvier 1964;
  • Secrétaire permanent : Secrétaire permanent au ministère de l’Éducation nationale, juillet 1965; Directeur du cabinet civil (chef de cabinet) à la présidence de la République, décembre 1967;
  • Secrétaire général : Secrétaire général et directeur du cabinet civil : janvier 1968; Ministre d’État, secrétaire général à la présidence de la République en juin 1970.
  • Premier ministre : Il devient Premier ministre de l’ancien président Ahmadou Ahidjo le 30 juin 1975.
S.E.M. Ahmadou Ahidjo – Premier Président du Cameroun
  • Président de la République : Le 4 novembre 1982, Ahidjo surprend tout le pays en annonçant sa démission après 24 ans à la tête de l’État. Biya, son successeur constitutionnel, prendra sa place deux jours plus tard, conformément à l’amendement constitutionnel institué par la loi n ° 79/02 du 29 juin 1979.
  • Son engagement : En prêtant serment, il s’engage à démocratiser la vie politique, à assainir l’économie, et à faire régner la rigueur dans la gestion des affaires publiques; il s’engage par ailleurs à moraliser les attitudes et à renforcer la coopération internationale.

Les crises

  • Le coup d’État : Au cours des dix années suivantes, Paul Biya a survécu à une série de crises, y compris une lutte pour le pouvoir avec Ahidjo, et une tentative de coup d’État en 1984.
  • Les troubles sociaux : Des troubles sociaux majeurs en 1990-92 ont conduit à une période de réformes lentes, y compris un processus d’ajustement structurel du FMI (1988) , à des élections multipartites (1992), des élections municipales et une nouvelle constitution (en 1996).
  • Ses « réélections » : Il est élu Président de la République le 14 janvier 1984, réélu le 24 avril 1988, puis le 11 octobre 1992 (Première élection au suffrage universel direct avec de nombreux candidats), le 12 octobre 1997 et le 11 octobre 2004, le 9 octobre 2011, et enfin le 7 octobre 2018 (victoire contestée par le leader prodémocratie du pays, Maurice Kamto).
MRC Cameroun Kamto
Maurice Kamto – Principal opposant au Régime de Paul Biya
  • Transformation de l’UNC en RDPC : Elu Président du RDPC, Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais, après la transformation de l’UNC en RDPC le 24 mars 1985 à Bamenda.
  • Restauration du multipartisme : Le 19 décembre 1990, Paul BIYA a promulgué la loi sur les associations et les partis politiques. Sous pression, il était en effet en train de restaurer le multipartisme au Cameroun (depuis septembre 1966, lorsque le Cameroun était sous le régime du parti unique).

La modification de la Constitution

L’année 2008 : L’année 2008 a peut-être été l’année la plus tumultueuse de la politique camerounaise de la décennie précédente.

  • Le nombre de mandats présidentiels : À partir du 1er janvier, Biya a utilisé son message du Nouvel An pour annoncer son intention de modifier la constitution de 1996 afin d’éliminer les limites du nombre de mandats présidentiels. Cela a déclenché une discussion publique, avec de nombreux membres de la société civile et l’opposition fortement opposés au projet.
  • Frustration générale : Le mécontentement à l’égard du changement constitutionnel proposé a contribué à la frustration générale face à la hausse des prix des denrées alimentaires et du carburant, et a déclenché les pires émeutes du pays en 15 ans, en février 2008.
  • Répression : Le gouvernement a réagi avec force, entraînant l’arrestation de plus de 1.600 personnes, la mort d’au moins 40 (chiffres officiels) et une période d’intimidation accrue des médias.
  • Adoption par le Parlement : En avril, le Parlement a adopté l’amendement constitutionnel sans pratiquement aucun débat, en éliminant non seulement les limites du nombre de mandats présidentiels, mais en accordant au président l’immunité contre d’éventuelles poursuites pénales. Le gouvernement a par la suite libéré de nombreuses personnes arrêtées, et a levé les restrictions imposées à plusieurs médias.

La question de sa succession

  • État de santé : La même année, Biya alimentera les rumeurs selon lesquelles il serait en mauvaise santé (une source médiatique avait par ailleurs rapporté qu’il était décédé). Il comptait sur un groupe restreint de conseillers pour obtenir des informations et, lorsqu’il était à la campagne, il passait la plupart de son temps dans son village. Même s’il semblait être en bonne santé, il avait déjà 75 ans, et ne fera rien pour réduire l’incertitude quant aux scénarios de sa succession.
  • L’absence d’un mécanisme de succession viable : Même les détracteurs de Biya craignaient que si le président mourait subitement, l’absence d’un mécanisme de succession viable et la faiblesse des institutions politiques pourraient plonger le pays dans une période de chaos.
  • Le « Code Biya » : En 2009, Biya a chargé un comité de compiler des comptes rendus de ses propres réalisations et a, par le biais des médias officiels, promu la publication du nouveau livre d’un journaliste français sur son leadership, «Le Code Biya». Certains avaient laissé entendre que cette démarche montrerait que Biya pensait à son héritage et se préparait à se retirer.
  • « Choisir » son successeur » : Biya a souvent fait remarquer que la manière dont Ahidjo lui a remis le pouvoir était « le meilleur moyen de transférer le pouvoir en Afrique », laissant penser que lui-même, Biya, aurait également prévu choisir un « successeur » à qui il passera le pouvoir.
  • L’Éveil des camerounais : Biya ne s’est pas rendu compte que les Camerounais n’accepteront pas un tel arrangement. Affaibli, sa légitimité publiquement contestée, le président camerounais pourrait passer sa dernière année à la tête de l’État camerounais.
  • Des temps difficiles s’annoncent : Les camerounais sont décidés à faire partir du pouvoir celui qu’ils considèrent comme le principal responsable de leurs souffrances. Le pouvoir de Paul Biya et sa nature dictatoriale semblent ne plus faire peur à personne. Des temps difficiles s’annoncent pour lui et pour son Régime. MN

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