Crise Anglophone : Les soutiens du Président camerounais

Crise Anglophone - Les soutiens du Président camerounaisLes Président Macron, Biya et Xi Jinping de la France, du Cameroun et de la Chine

Présenter les puissances qui consolident leurs liens et naviguent à contre-courant des différentes formes de pression internationale exercée contre le gouvernement camerounais pour une gestion rapide de la crise anglophone, est la préoccupation centrale de cette analyse.

La fermeté américaine

 « Les États-Unis sont déterminés à mettre un terme à la violence qui continue au Cameroun et à soutenir le peuple camerounais. À partir d’aujourd’hui, nous imposons des restrictions en matière de visas à ceux qui sapent la paix dans les régions anglophones du Cameroun. »

Cette récente sortie du Secrétaire d’État Anthony Blinken traduit de manière explicite la position du gouvernement américain à déployer de nouvelles mesures pour contraindre le gouvernement camerounais à redoubler les efforts dans la résolution de la crise anglophone.

Propos qui interpellent également sur la volonté du leader américain à mobiliser l’attention de la communauté internationale afin qu’elle assiste l’élite camerounaise dans la gestion d’une crise qui a tendance à perdurer et dont les populations civiles sont les principales victimes.

La récente bavure observée à Bafanji, village situé à Balikumba (dans la région du Nord-Ouest), à la suite d’un échange armé entre les séparatistes et l’armée, mobilise les attentions.

Cette inquiétude américaine était déjà manifestée par le sous-secrétaire d’État américain Peter Tibor Naguy et plusieurs sénateurs (Ben Cardin du Maryland ; Todd Young de l’Indiana, Chris Van Hollen du Maryland, Chris Coons du Delaware, Ed Markey du Massachusetts, Cory Booker du New Jersey et Amy Jean Klobuchar du Minnesota).

Ces derniers, après l’arrestation des 47 leaders sécessionnistes au Nigéria le 29 janvier 2018, ont :

  • publiquement dénoncé les assassinats et enlèvements perpétrés par les combattants séparatistes ;
  • invité le Sénat américain à exhorter toutes les parties à accepter un cessez-le-feu immédiat et à engager un dialogue inclusif avec la société civile ;
  • invité le gouvernement camerounais à inculper ou libérer rapidement toutes les personnes détenues dans le contexte de la crise anglophone.

Plus récemment, sous l’initiative de Jim Rish et autres sénateurs inquiets de la situation criminogène dans ces régions du Cameroun, le congrès américain, à travers la résolution 684 du 1er janvier 2021, a appelé le gouvernement du Cameroun et les groupes séparatistes à :

  • mettre fin à toute violence ;
  • respecter les droits de l’homme de tous les Camerounais
  • poursuivre un dialogue véritablement inclusif pour résoudre ce problème.

Le soutien chinois au régime camerounais 

En réponse à la doléance américaine favorable à un débat sur la question camerounaise au sein des institutions onusiennes, la Chine a, quant à elle, renouvelé son assistance au gouvernement camerounais, contraire à une intervention immédiate pour solutionner le problème qui oppose le gouvernement aux séparatistes.

Une invitation à faire preuve de non-ingérence dans les affaires internes du Cameroun reprise ensuite par l’ambassadeur Wang Yingwu le 15 Mai 2019 en ces termes :

« la situation est un problème du Cameroun et nous pensons que les autorités camerounaises et leurs citoyens sont capables de gérer et chercher des solutions de paix, de sécurité et du développement économique de leur propre pays. La communauté internationale a le devoir de respecter la souveraineté, l’intégrité territoriale du Cameroun ».

La réplique de la Chine au lendemain du massacre de Ngarbuh le 14 février 2020 fut, une fois de plus, contraire à la logique administrative américaine propice à l’ouverture d’une enquête et une condamnation des acteurs de ce massacre.

La Chine a fait plutôt un don au gouvernement camerounais d’un montant de 1,6 milliard de franc CFA. Qualifié de plan d’assistance humanitaire d’urgence, cette donation était composée de : 08 pick-up ; 2000 lits d’hôpital ; 2500 chaises ; 2500 tables ; 500 matelas et 20 unités radiologiques.

Dans son un message du 26 Mars 2021 au président Biya pour se féliciter du cinquantenaire des relations sino-camerounaises, le leader du Parti Communiste Chinois (PCC), Xi Jinping, s’est une fois de plus distingué en ne faisant pas recours à la crise anglophone, malgré les violences observées.   

La position française : stabilité du système et des relations politiques

Au lendemain de l’incident du Nigéria, plusieurs échanges diplomatiques, téléphoniques ou par des émissaires français ont été observés pour renforcer la coopération entre les gouvernements de France et du Cameroun.

À la suite de l’arrestation des leaders séparatistes et la recrudescence des violences, le président Macron a dépêché Jean Baptiste Lemoyne pour un séjour au Cameroun et dans les régions en crise, afin de s’enquérir de la situation.

Au terme de cette visite, les présidents Macron et Biya ont échangé par téléphone le 31 juin 2018 et réaffirmé le soutien inconditionnel de la France.

Comme le leader français l’avait si bien rappelé, il est ressorti de cet entretien que ce n’est pas au président de la France de le dire mais d’accompagner toutes ces reformes de décentralisation et de liberté régionale initiées par le Cameroun pour sortir de cette crise.

Cette intention de stabilisation et de consolidation des relations entre les deux pays a été rendue manifeste par un courrier confidentiel daté du 25 Octobre 2018, au travers duquel, le président Macron félicitait son homologue camerounais pour sa victoire aux élections présidentielles, tout en exprimant sa « préoccupation profonde » pour une gestion rapide de la crise dans l’anglosphère.

Par la suite, une promesse a été faite par le président Macron qui envisageait faire « pression sur Paul Biya pour qu’il traite le sujet de la zone anglophone et de ses opposants… ».

Un « maximum de pression » qui s’est traduit plus tard, à la suite des évènements de Ngarbuh et l’échange téléphonique du 1er Mars 2020, par des engagements de ces derniers à :

  • initier une enquête impartiale en réaction aux violences commises contre des populations civiles dans le village de Ngarbuh » ;
  • rester en contact pour le suivi des initiatives politiques issues du Grand Dialogue National (organisé entre le 30 Septembre et le 04 Octobre 2019 à Yaoundé), en particulier la mise en place d’un statut spécial pour les régions en crise.

La position de la France reste constante autour du soutien inconditionnel à l’endroit du gouvernement camerounais.

D’après le président Macron, la solution au conflit est toute simple et construite autour de deux indicateurs de paix :

  • la stabilité politique, 
  • la reconnaissance des éléments de pluralisme et de décentralisation.

Une réaction française qui prête à confusion et qui est, depuis un certain temps, constamment dénoncée par la communauté internationale et des acteurs politiques français.

Une position de la France vivement dénoncée

À la suite des interpellations de Jim Rish et autres sénateurs américains ponctuées par la validation de la résolution 684 du congrès américain, cette institution s’est également indignée de l’action de la France.

Pour les leaders américains, la France se contente de maintenir des intérêts considérables au Cameroun et consolider une coopération économique et sécuritaire significative.

Elle n’utilise pas suffisamment son influence pour endiguer les atrocités commises dans les régions anglophones ou pour soutenir une action internationale plus forte à la recherche d’une résolution efficace et durable du conflit.

L’autre grief contre la France est partagé par Sebastien Nadot, un élu français de la Haute-Garonne, qui ne cesse de dénoncer la faible implication de son pays dans la résolution de cette crise.

Dans sa sortie du 18 février 2021, il martelait, à l’instar du congrès américain, que la France dispose des moyens nécessaires pour attirer davantage l’attention de la communauté internationale sur ce conflit.

Il va plus loin lorsqu’il appelle le pouvoir français à cesser de se cacher derrière le paravent de l’ingérence pour agir autant qu’il sait souvent le faire dans le cadre de ses relations économiques avec le Cameroun.

La critique la plus acerbe de l’attitude française est partagée par l’activiste ProDémocratie Rebecca Tinsley pour qui :

« La France est en mesure d’apporter de la pression au niveau diplomatique sur le gouvernement camerounais pour travailler sur la pacification du pays et trouver une nouvelle voie au niveau constitutionnel qui pourrait convenir à tout le monde : aux anglophones et aux francophones.

« Et si la pression diplomatique ne fonctionne pas, poursuit-elle, alors la France peut travailler sur un régime de sanctions visant des individus impliqués dans les abus des droits de l’homme ».

La rencontre entre Anthony Blinken et Jean-Yves Le Drian au sommet du G7 du 11 au 13 Juin 2021 en Angleterre est source d’espoir. Car ces derniers semblent désormais s’accorder pour une résolution pacifique du conflit au Cameroun. MN

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